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Trois aprioris sur le Scrabble Classique

Paul Ravel, délégué classique du Comité, nous propose d'analyser trois idées généralement reçues quant à la pratique du Scrabble Classique. Une analyse à lire sans modération.


Après avoir découvert et admiré, à Plérin, les techniques de certains champions de Scrabble Classique, voici une proposition d’analyse qui peut vous convaincre de redécouvrir cette formule lors des prochains tournois organisés dans le comité Lyonnais.


Le Classique, c’est beaucoup de chance ! 

D’accord


Orphée Visvikis, responsable du classique pour la FISF, estime à 15% la part de chance due au hasard du tirage. Il se base sur une étude effectuée par des joueurs de Scrabble anglophone, grands adeptes de la formule en face-à-face, qu’ils privilégient au Duplicate depuis une cinquantaine d’années.

Cette part de hasard a ouvert la porte à de belles surprises, permettant à des joueurs d’horizons divers de réaliser des exploits remarquables.

Le dernier en date a eu lieu à Plérin cette année. Le joueur nancéien Lionel Behra, de niveau 2A en Duplicate, a remporté le championnat de France classique au nez et à la barbe de Benjamin Valour, Samson Tessier ou encore Gauthier Houillon.

En un seul mot, pour avoir été sur place à ce moment-là, il y avait de la « magie » dans l’air, une satisfaction inexplicable de voir un joueur non favori réaliser la compétition de sa vie.

Je parlerais ici de la « grande ouverture » du Scrabble Classique, une ouverture à l’inconnu mais aussi à l’exploit, dans une énergie souvent bienveillante et plutôt conviviale. C’est cela qui personnellement me fait aimer la formule.


Pas vraiment d’accord


Tout l’art du Classique consiste à minimiser la part de chance causée par le tirage. Une fois que les principales techniques de jeu sont apprivoisées puis maîtrisées, on s’aperçoit que la chance devient alors mineure. C’est ce qui permet à Benjamin Valour de figurer chaque année dans le « Top 5 » des championnats de France depuis 2019.

Pour cela, divers outils sont utilisés par les champions : ils rejettent leur reliquat au bon moment, veillent à conserver les bonnes lettres, anticipent les coups adverses, ou se projettent deux voire 3 coups en avance - impressionnant, non ?

  

Le Classique consiste à fermer le jeu

D’accord


Dans le Classique, tout le monde ou presque finit par se connaitre. L’un développe un jeu « ouvert », tandis que l’autre a tendance à bloquer le jeu. Mais force est de constater que les cas de blocage sont minoritaires dans les grandes compétitions.

À Plérin, face à Bernard Clavier, Flavien Suck se retrouve dans la même impasse, car aucun joueur ne dispose d’assez de bonnes lettres pour se permettre d’ouvrir la grille. La partie se fait plutôt longue, et les petits mots de 3 à 4 lettres affluent sur le plateau. Une de ces rares « purges » qui nous enlève pour un temps le plaisir du jeu.

De mon côté, c’est contre Jean-Francois Deron que je connus un tel scénario. Très expérimenté, il a d’abord amorcé un blocage partiel de la grille, afin de faire parler son sens tactique aiguisé. Dans un second temps, j’avoue l’avoir suivi dans cette entreprise, vraisemblablement d’une manière assez gauche, pour éviter de prendre une valise face à ce grand champion.

Mais sachez-le : seules 5 à 10% des parties jouées à Plérin par les joueurs Lyonnais possédaient une physionomie fermée.


Pas vraiment d’accord


En y réfléchissant bien, on se rend compte que la meilleure des solutions n’est généralement pas de bloquer le jeu. Si un joueur bloque le jeu pour son adversaire, il est évident qu’il le bloque également pour lui-même.

Il s’agirait à l’inverse d’ouvrir la grille intelligemment, en réfléchissant à ce que je peux jouer au coup suivant, mais également à ce que mon adversaire est susceptible de m’infliger avec les lettres restant dans le sac.

D’ailleurs, un premier conseil est souvent donné aux nouveaux arrivants dans la formule classique, dont je fais partie depuis maintenant quelques mois : pensez à ouvrir le jeu, mais évitez d’ouvrir des places à nonuple à votre adversaire.


Quand on a connu le Duplicate, difficile de retourner au Classique

D’accord


Il apparaît évident que la création du Scrabble Duplicate francophone en 1970 est une belle prouesse, et que le Classique s’en trouva par la suite parfaitement effacé. Cette formule de jeu en « solo » permit avant toute chose d’amener l’équité, et de gommer toute part de chance liée au hasard des tirages, ce qui constitue pour certains le « défaut » du classique.

Elle a également amené l’augmentation considérable du nombre de participants aux différents tournois, avec la création de multiplex internationaux, rendus possibles par la nouvelle formule de jeu.

En dernier lieu, le développement de l’informatique a permis, un jour, de se comparer au « top » choisi par l’ordinateur, et d’apprendre encore et toujours de nouveaux mots que l’on aurait laissé échapper dans nos recherches.

Cependant, les récentes performances du néo-zélandais Nigel Richards aux Championnats du Monde francophone - il a fini les 7 parties au top lors des 3 dernières éditions qu’il a disputées - ont donné des envies d’ailleurs à certains excellents joueurs de Duplicate, qui se sont partiellement tournés vers le Classique.


Pas vraiment d’accord


L’hypothèse d’une complémentarité entre les 2 formules n’a rien d’ambigüe. Je trouve que le classique apporte sa propre touche à côté des formules de jeu actuelles (Originales, Paires, Blitz), et qu’il possède des avantages indéniables vis-à-vis du Duplicate. La formule en appelle au sens tactique des joueurs, et convient donc aux joueurs stratèges. 

Les compétitions se déroulent très souvent à taille humaine et permettent souvent, par conséquent, de tisser des liens plus étroits avec ses partenaires de jeu.

Enfin, pour les nouveaux adhérents, j’imagine que le Classique paraît plus engageant, ou en tout cas moins déroutant que le Duplicate, où l’on rencontre parfois des tops ardus ou extravagants.


Pour conclure, je me permets d’espérer le développement du classique au sein du comité Lyonnais, grâce à la participation des licenciés intéressés par la formule aux futurs tournois locaux, qui apparaîtront petit à petit dans le calendrier du Comité. Le contexte fédéral semble également encourageant, puisque la DNSC entreprend des manœuvres à partir de 2025, avec la création de 4 tournois majeurs en Classique, aussi appelés « Tournois du grand Chelem » dont le comité Lyonnais pourrait à terme devenir l’un des hôtes.

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